A mes yeux écho pratique à la Théorie de la Désintégration Positive de K Dabrowski, cet article rédigé par Andrew Mahoney (voir un précédent billet sur le sujet, qui expliquait l’importance de la prise de conscience pour mieux vivre son surdon).
Ici, une fois la prise de conscience effectuée, Andrew Mahoney explique l’importance de trois étapes supplémentaires : la reconnaissance, l’acceptation, et enfin : l’appréciation qui ouvre sur un mode « développement de soi » autrement plus constructif et dynamisant que le mode « survie » dans lequel tant de surdoués restent confinés.
Il livre là un véritable messsage d’espoir pour ceux qui souffrent à s’en demander si la vie a vraiment un sens.
Accès à l’intégralité du texte original d’Andrew Mahoney ici >>> « Coping through awareness »
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La Reconnaissance
Une fois la prise de conscience effectuée, alors la reconnaissance est possible, apportant avec elle le sentiment de se sentir valide, de ne plus se sentir fou : “je suis hautement surdoué, et ainsi le sont également ces aspects très précieux en moi.”
La reconnaissance est le “pourquoi” de ce que je suis au plus profond de moi. Elle proclame une réalité qui me permet de donner un sens à mon surdon et de s’exercer à en reconnaître un peu la nature.
Cette compréhension ne peut survenir que dès lors que la personne surdouée aura été capable de prendre conscience de son surdon et d’expérimenter ce qui ainsi la rend unique.
Quand une personne surdouée reconnaît qu’elle a ces ressentis, ces aspects, cette singularité et des côtés souvent extrêmes, elle peut alors formuler des méthodes qui lui permettent de faire avec son surdon et de se développer en l’intégrant pleinement.
La reconnaissance donne un sens et une raison à la vie. C’est n’est vraiment que comme ça qu’il est vraiment possible de pouvoir vivre avec son surdon.
« Arrêter de nier m’a permis de bien intégrer mon surdon par le biais de la prise de conscience et je peux maintenant donner raison et sens à ce que je suis en tant que surdoué
Cet état ne fait pas pour autant échapper à la douleur ou à l’intensité, et il ne permet pas non plus de voir tous ses besoins satisfaits ; mais c’est un état qui est le fondement du développement et du changement.
La reconnaissance vient quand on arrête de refuser de prendre conscience de ce qu’on est surdoué. Le sens caché de tout ce que l’on a vécu jusqu’alors devient clair et prend tout son sens.
L’Appréciation
Apprécier le fait d’être hautement surdoué signifie accepter toutes les facettes de la personnalité d’un surdoué. L’appréciation ne peut cependant venir qu’après les premières explorations de ce que signifie être surdoué, et ce, grâce à la prise de conscience et à la reconnaissance.
Ce qui était jusqu’alors perçu comme un handicap ou comme des caractéristiques subies, devient, grâce à l’appréciation, atouts de valeur.
Une fois que le surdoué ne nie plus ses caractéristiques et donc ses différences, il devient alors capable de comprendre à la fois cette angoisse existentielle qui l’accompagne et ce sens particulièrement développé d’être « font » le surdon.
En appréciant les dons qui sont siens, mais aussi tout ce que ça induit, il est armé pour partager ces dons avec le reste du monde de façon désintéressée, directement inspirée de « qui il est ».
L’appréciation est transcendance. Elle est l’étape ultime du changement et de la capacité à assumer son surdon.
Au regard de tout le processus d’adaptation, l’appréciation, c’est le moment du repos. « Quand j’atteins cette étape de l’appréciation, je peux apprécier mon existence et aussi accumuler de l’énergie pour les prochaines étapes de mon développement, quand l’adaptation n’appartient plus qu’au passé. J’ai évolué à un stade qui va au-delà de l’adaptation, quand la maitrise de soi devient à la fois possible tout en même temps qu’essentielle». Quand un surdoué a atteint le stade de l’appréciation, il n’a plus besoin de nier ou de résister à ce qu’il est.
L’Acceptation
Souvent, les surdoués se voient encouragés à accepter leur surdon et ce qu’il implique, sans chercher à respecter les étapes de la prise de conscience, de la reconnaissance et de l’appréciation. Or l’acceptation ne peut être complète que lorsque les trois précédentes étapes ont été traversées (et surmontées).
Dès lors que ces étapes ont été respectées, l’acceptation devient un dérivé naturel de l’existence, qui permet de se laisser aller avec ce qui fut, à une époque, étranger à soi-même, sans aucun sens ni aucune valeur. « Quand je m’accepte tel que je suis, avec mes dons et talents, je suis alors libre d’être et d’expérimenter pleinement qui je suis vraiment »
A ce degré de développement personnel, la personne surdouée a pleinement intégré cette capacité à être unique, sa singularité. « Je la ressens, je la comprends, et je comprends le sens de ce que je suis et de l’appréciation que je peux en avoir »
Chaque fois qu’une personne surdouée traverse ce processus de mutation, elle approfondit sa compréhension de ce que signifie être surdoué, mais aussi sa capacité à s’en accommoder. Une fois qu’elle atteint l’étape de l’acceptation, elle ouvre la porte à une prise de conscience plus grande encore. Ce cycle qui part de la prise de conscience pour aller vers l’acceptation est un cycle naturel. Il pourra bien sûr être facilité et enrichi par les professeurs, les parents, ou des thérapeutes.
L’histoire suivante raconte le cheminement de Seth. Bien qu’il n’ait aucune conscience délibérée de ce processus de transformation, il l’a expérimenté naturellement.
Jeune adulte, Seth avait passé une grande partie de son adolescence à essayer de s’intégrer à ses pairs.
Enfant, il avait plus ou moins compris qu’il était différent et n’agissait ni ne concevait le monde comme les autres enfants de son âge. Il se sentait seul et étrange. Il avait alors développé des stratégies d’adaptation qui lui permettaient de nier sa singularité et la souffrance qui y était associée. Recherchant activement un moyen d’échapper à cette souffrance, il décida de recourir à l’intégration et à un certain conformisme qui lui permettraient d’être reconnu par ses pairs.Il refusait de faire face à son surdon et aux ressentis qui l’accompagnent. Il craignait d’être rejeté si les autres percevaient sa différence. Il investissait donc toute son énergie à se conformer au groupe pour ne pas apparaître étrange ou anormal.
Ce déni de ce qu’il était vraiment n’eut pas particulièrement d’impact sur son adolescence. Il n’avait pas conscience de ce que son comportement, ses attitudes, étaient influencés par ce déni du surdon.
Alors même que la prise de conscience du surdon lui faisait inconsciemment extrêmement peur, il avait cependant conscience qu’il y avait quelque chose qui clochait dans sa façon de se conformer au monde.
Il était donc là désormais, jeune adulte, et après de nombreuses années à ne pas se regarder en face tel qu’il était vraiment, il se sentait vide, dans une vie qui n’avait aucun sens.
Il avait de plus en plus de mal à s’accommoder de la vie telle qu’il la vivait. Les gens qu’il avait autrefois tentés d’impressionner étaient maintenant à l’université ou suivaient d’autres chemins. Seth était là, se sentant plus seul que jamais. Il commença à se poser des questions sur cette solitude et sur l’absence de sens de sa vie.
La souffrance s’insinua toujours plus avant et il commença à avoir le sentiment qu’il s’était trahi lui-même tout au long de sa jeunesse.
La prise de conscience commença à émerger chez Seth dès lors qu’il accepta de commencer à s’interroger sur ce qui faisait sa souffrance. Il ne comprenait pas pourquoi il ressentait tout ceci. Il savait seulement qu’il y avait tout ça, toute cette souffrance, toutes ces idées qui le traversaient, et qu’l n’y avait aucun lieu où il puisse désormais se cacher pour échapper à ce réveil existentiel.
Un jour, il finit par s’autoriser à ne plus lutter contre ces sentiments. Et pendant plusieurs semaines, il les laissa pleinement s’exprimer et y prêta attention. Et alors que ces sentiments et ressentis s’exprimaient librement, il commença à remarquer que cette prise de conscience toute nouvelle était en train de devenir compréhension et reconnaissance.
Il réalisa que, d’une certaine façon, son refus de se reconnaître surdoué était associé à ce sentiment de se trahir lui-même. Pour la première fois, Seth eut le sentiment qu’il allait pouvoir survivre à sa souffrance, qu’l allait pouvoir s’accommoder de ce que signifiait être surdoué.
Et plus il acceptait ses sentiments, mieux il se comprenait. Il commençait désormais à percevoir des réponses à ses questions, en particulier sur la raison pour laquelle les choses se passaient comme elles se passaient. Pourquoi, enfant, il avait fui la réalité (et la souffrance associée) de son surdon. Pourquoi il avait tenté si fort de s’intégrer aux autres durant son adolescence, au point de trahir ses valeurs les plus intimes, ignorant ses sentiments les plus profonds et niant ses talents.
En continuant à explorer ses sentiments et à reconnaître sa vraie nature, Seth commença à identifier ce qu’il recherchait vraiment. Il commença à comprendre ce combat que représentait sa vie.
Dépassant alors le stade de la simple survie, il commença à avoir envie d’utiliser son potentiel, peut-être retourner à l’université ou bien se remettre à créer, ainsi qu’il l’avait fait avant son adolescence.
Parce qu’il a réussi à profondément apprécier qui il était, il a pu se développer avec une meilleure connaissance de lui-même et surtout moins de peur. En acceptant de faire face à son surdon et de l’explorer, il a atteint le niveau de l’acceptation. Et acceptant qu’il il était et surtout qui il avait toujours été (c’éta-à-dire quelqu’un de hautement surdoué), il n’eut plus besoin de se renier et ou de se trahir lui-même.
L’acceptation de son surdon a désormais ouvert pour Seth un nouveau niveau de conscience, mais cette fois-ci en incluant ses caractéristiques de surdoué.
Même si Seth a découvert tout seul le moyen de s’adapter et de s’affirmer, faire prendre conscience de ce modèle de processus de transformation peut-être un moyen, pour les jeunes adultes, de déboucher plus rapidement sur une vie plus riche.