Voici donc un peu plus en détail présenté le Modèle de Formation de l’Identité du Surdoué développé par Andrew Mahoney et présenté dans un précédent billet.
Le grand intérêt de ce modèle à mes yeux est qu’au lieu de tout centrer sur le surdon (concept difficile à appréhender), celui-ci est pris comme une variable qui intervient dans la construction de l’identité du patient, au même titre que d’autres expériences personnelles.
Ce billet s’attache donc à décrire les constructions personnelles. Le prochain billet présentera les systèmes qui induisent ces constructions. Un dernier billet présentera quelques suggestions faites par Andrew Mahoney aux thérapeutes pour une mise en oeuvre facilitée du modèle.
En utilisant une grille croisée (Figure 1) de 4 constructions (Validation, Affirmation, Affiliation, et Aspirations Profondes) et 12 systèmes (le Moi, la Famille, les origines familiales, la culture, la vocation, l’environnement, l’éducation, la société, les aspects psychologiques, la politique, les aspects Organiques et Physiologiques ainsi que les aspects développementaux),
les thérapeutes (seuls ou avec leur client) explorent, discutent et établissent les composants du développement de l’identité, prenant le surdon comme une simple variable (Figure 2).
Par exemple, quand on explore chacune des constructions, il est important de déterminer l’impact positif, négatif ou quelque part entre les deux du surdon .
Constructions et systèmes sont différenciés pour accentuer la complexité de l’identité et le processus de formation de l’identité. En listant ces variables et facettes de la formation de l’identité, le thérapeute et le patient sont ainsi capables de gérer la complexité et de travailler sur l’identité de façon moins abstraite.
Le modèle peut parfaitement se recouper avec d’autres cadres d’accompagnement existants. Par exemple, si le psychologue scolaire a ms en œuvre un travail de réflexion aux opportunités de carrière, ce modèle peut apporter un outil différencié adaptés aux étudiants surdoués.
Ceci peut permettre par ailleurs aux individus de définir des domaines de forces et d’identifier les moyens d’apporter un meilleur soutien dans les domaines qui demandent un accompagnement lié à leur surdon.
De plus, le modèle peut être utilisé pour des interventions qui vont aider les surdoués à être plus à l’écoute de leur surdon, et de leur démontrer comment leur surdon peut avoir un rôle effectif dans leur travail, leur éducation, leur développement et leurs relations. L’objectif est de mesurer et d’introduire la variable surdon dans de nombreux contextes pour soutenir et développer l’identité du surdoué comme partie intégrante du Moi.
Par exemple, quand on explore chacune des constructions, il est important de déterminer l’impact positif, négatif ou quelque part entre les deux du surdon.
Constructions et systèmes sont différenciés pour accentuer la complexité de l’identité et le processus de formation de l’identité. En listant ces variables et facettes de la formation de l’identité, le thérapeute et le patient sont capables de gérer la complexité et de travailler sur l’identité de façon moins abstraite.
Le modèle peut parfaitement se recouper avec d’autres cadres d’accompagnement existants. Par exemple, si le psychologue scolaire a ms en œuvre un travail de réflexion aux opportunités de carrière, ce modèle peut apporter un outil différencié adaptés aux étudiants surdoués.
Ceci peut permettre par ailleurs aux individus de définir des domaines de forces et d’identifier les moyens d’apporter un meilleur soutien dans les domaines qui demandent un accompagnement lié à leur surdon.
De plus, le modèle peut être utilisé pour des interventions qui vont aider les surdoués à être plus à l’écoute de leur surdon, et de leur démontrer comment leur surdon peut avoir un rôle effectif dans leur travail, leur éducation, leur développement et leurs relations. L’objectif est de mesurer et d’introduire la variable surdon dans de nombreux contextes pour soutenir et développer l’identité du surdoué comme partie intégrante du Moi.
Les quatre constructions
Ces quatre constructions représentent quelques unes des forces ou des fondations qui façonnent et influencent l’identité. Ces points particulier sont décrits et délimités afin d’aider le thérapeute à trier et à travailler avec la nature complexe de l’identité d’un surdoué et la façon dont elle se forme.
Il n’y a pas d’ordre particulier pour aborder ces constructions, même si on peut les ordonner selon une certaine logique. Par exemple, les enfants sont souvent identifiés comme surdoués d’une façon formelle (cf la Validation) avant de se voir proposer de suivre un programme spécifique (cf l’Affirmation).
L’auteur encourage le recours à ces constructions d’une façon fluide afin de bien confirmer combien l’identité est multifacettes, complexe, et surtout, en constante évolution.
– Validation : Cette première construction concerne la reconnaissance que le surdon existe chez quelqu’un, et que c’est reconnu et corroboré par soi-même ou par les autres.
La reconnaissance trouve son origine dans les toutes premières relations avec soi-même, les parents, les professeurs, les institutions, et toute personne en situation d’autorité.
Ces relations sont reconnues comme les toutes premières en ce sens que l’individu est dépendant de ces relations ou sources de validation pour, d’une façon ou d’une autre, faciliter son développement ou son évolution.
La validation du surdon peut venir tout autant du monde académique (programme spécifique) que d’une personne qui fait autorité et/ou encore de soi-même grâce à des résultats exceptionnels. Mais il faut faire attention à l’aspect limitatif de la validation qui sera retenue : ne pas être retenu pour un programme spécifique pour les surdoué peut être invalidant pour un enfant surdoué : il n’est pas surdoué, puisque c’est l’école qui le dit…
De ce fait, pour faciliter une meilleure compréhension d’eux-mêmes par les patients surdoués, il serait pertinent que les thérapeutes définissent une batterie d’indicateurs de compétences qui aide les surdoués à comprendre la réalité de leur surdon.
Il faut se rappeler en permanence que les personnes qui ne perçoivent pas la réalité de leur surdon peuvent souffrir d’une faible estime de soi, et d’une perception d’eux-mêmes qui est dégradée. Si la réalité du surdon chez un individu est définie de manière limitée, les possibilités de développement de ce surdon seront tout aussi limitées.
Attention également à la conscience que les parents ont un enfant surdoué : savent ils ce qu’est le surdon, reconnaissent- et acceptent-ils que leur enfant soit surdoué ?
Cette reconnaissance du surdon de leur enfant peut venir de son inscription dans un programme spécifique pour surdoués, ou bien en lui proposant des activités et en lui fournissant des opportunités qui lui permettront de se comprendre et de se développer en prenant en compte son surdon.
La Validation est vraiment un marqueur important du surdon.
– Affirmation Cette seconde construction requiert une reconnaissance interactive de qui nous sommes (un soutien à la dynamique de développement), de la part de beaucoup d’individus ou à travers beaucoup de processus.
C’est le renforcement permanent de toutes les aspects que peut prendre le surdon chez un individu, à partir de ses apprentissages, de ses expériences, de son environnement, de ses parents, de ses professeurs, et de son enrichissement général. C’est le processus permanent et interactif d’interaction entre le surdoué et le reste du monde. Un processus destiné à renforcer en soi le fait que « je suis surdoué”.
L’affirmation peut aussi être négative s’il y a absence de renforcement ou en cas de réactions négatives.
Exemple positif d’affirmation : l’enfant est inscrit à un programme pour surdoués qui lui permet de stimuler en permanence ses potentiels et de bénéficier en continu d’un effet miroir positif au sujet de son surdon.
Autre exemple qui, lui, vient de l’environnement familial (en prenant en compte les cadres de pensées mis en place par les générations précédentes). L’affirmation qui vient de ce système provient à la fois de structures de valeurs conscientes et inconscientes qui sont transmises de générations en générations : ainsi, si, pour une famille donnée, et depuis des générations, le surdon n’est pas affirmé chez les femmes, si ces dernières se voient interdire de poursuivre des études supérieures, le développement des dons intellectuels des femmes n’est ni reconnu ni soutenu.
Ce qui précdède est un exemple typique d’affirmation négative. Ce type de valeur est souvent profondément ancré dans l’identité d’une personne et doit être exploré pour conduire à une prise de conscience claire de cet état de fait.
L’individu surdoué que l’on aide ainsi à explorer son surdon, sous l’angle de la transmission des valeurs et croyances familiales, pourra entamer sur des bases assainies une réflexion sur ce qui le différencie des autres, et ainsi prendre plus pleinement en compte son surdon.
La conscience de son surdon ne facilite pourtant pas toujours le développement. A ce stade, le savoir-faire du thérapeute est nécessaire pour intervenir et permettre d’avancer sur ce chemin de la prise de conscience. Dans les exemples précédents la contruction de l’Affirmation était vue au prisme du système de valeurs familiales, du système culturel et du système académique, démontrant combien ce modèle permet une mesure qui induit naturellement l’exploration d’autres constructions et d’autres systèmes.
– Affiliation C’est une alliance ou une association avec d’autres personnes qui vivent les mêmes intensités, les mêmes passions, les mêmes désirs et les mêmes capacités. Cela signifie être intégré dans une association, une confrérie, ou un groupe en pouvant y reste soi sans perdre son identité (ou son Moi).
L’affiliation donne une raison d’être en fournissant une passerelle entre soi et la communauté. Le processus de l’individuation repose largement sur l’affiliation pour permettre au Moi d’exister par lui-même.
Pour le développement optimal d’une identité de surdoué, il importe bien sûr que l’association ou l’alliance encourage le surdon.
Quand on parle de validation les premières relations (parents, professeurs, et autres figures d’autorité) sont fondamentales.
Quand il s’agit d’affiliation, ce sont les relations secondaires qui prennent toute leur importance (pairs, frères et sœurs, collègues de travail etc.). Ces relations facilitent l’individuation du Moi en encourageant la séparation de la famille d’origine et des parents. De cette façon, l’affiliation encourage l’individuation et le développement d’un Moi sain et complet.
La reconnaissance d’un besoin d’appartenance, de l’importance de cette raison qui pousse à savoir « qui je suis ? » est incluse dans ce processus d’affiliation
L’affiliation du surdoué lui fournit un forum dans lequel les individus sont appréciés et acceptés dans leur singularité. C’est par le biais d’affiliations appropriées que l’enfant surdoué n’aura pas à nier son surdon pour se faire des amis. Pour être intégré, les individus ont besoin d’être valorisés pour ce qu’ils sont – pour leur singularité, pour leur talent, pour leur spécificité… et aussi parce que ce sont des être humains comme les autres. Là commence vraiment l’intégration. Chacun expérimente la rencontre avec d’autres qui lui ressemblent loin de toute source première de validation (les figures d’autorité dont il a si longtemps dépendu).
A ce point, on peut alors voir son surdon validé, reconnu et apprécié par d’autres et on commence à atteindre un niveau plus élevé d’appréciation de soi-même et d’acceptation.
Affilier, intégrer les aspects surdoués de ce que l’on est, est très certainement l’une des plus puissantes méthodes pour se remettre de ce sentiment de décalage, de bizarrerie, et de l’isolement que les surdoués ressentent si souvent.
Pour les surdoués, l’affiliation est cependant souvent difficile. A part MENSA, il y a peu d’organisations pour les adultes surdoués dans lesquelles ceux-ci puissent trouver des stimulations réciproques et un soutien adapté au développement de leur surdon.
Le Modèle de Formation de l’Identité du Surdoué (MFIS) peut être utilisé pour évaluer un certain nombre d’environnements qui pourraient fournir des endroits pour s’intégrer.
Un environnement de travail pourrait ainsi être réorganisé, de telle façon que les gens aux esprits similaires puissent avoir plus d’opportunités de travailler ensemble, ou tout simplement de se retrouver pour le plaisir.Il faut bien se rappeler qu’affiliation ne signifie pas pour autant exclusion des autres. Les gens peuvent se rassembler en sous groupes à l’intérieur de groupes plus grands (exemples des groupes de travail en environnement professionnel).
Dans un environnement scolaire, un conseiller ou un professeur peut vouloir démarrer un groupe pour ceux qui ont des talents d’ artistes : écrivains, musiciens, qui se rencontrent périodiquement plutôt que de voir l’affiliation entre surdoués comme relevant simplement du domaine intellectuel. Il est important de créer des affiliations à micro niveau selon des thématiques multiples. Ceci aidera à élargir la vision de ce qu’est le surdon, et à réduire la propagation des images stéréotypées.
– Les aspirations profondes Cette quatrième construction est celle qui maintient la flamme en chacun. C’est une attraction vers ce qui nourrit et rassemble, l’accord des âmes, esprit et philosophie, non un cri, mais un appel. C’est quelque chose qui a à voir avec l’âme, une mission, et une explication du sens de la vie. Ceci fait appel à un sens plus ésotérique et plus profond. Les aspirations profondes connectent le Moi au reste du monde et au mystère de la vie.
Les aspirations profondes ont souvent besoin d’être mises de côté quand le processus d’identité n’est pas maximisé. Les aspirations profondes non satisfaites génèrent de l’angoisse en rendant la vie encore plus ténue. « Si je ne vois pas ces aspirations profondes (ma vocation) satisfaites, alors je ne ressentirai jamais de sentiment de plénitude et je ne pourrai jamais dépasser mon angoisse »
La satisfaction de ces aspirationss profondes apporte la plénitude, favorise la stimulation par des mises au défi appropriées, et développe les caractéristiques du surdon – ce pourrait bien être la quête ultime de certains. Sans la conscience et la satisfaction de ces aspirations profondes, l’individu surdoué se sent souvent impuissant et à côté de sa vie et de celle des autres. Les aspirations profondes permettent l’affiliation, mais conduisent aussi au développement des dons, ou permettent de se remettre de l’anxiété existentielle qui accompagne le surdon.
Si on ne peut satisfaire ces aspirations profondes, il n’y a, alors, aucun répit, aucun refuge pour se protéger du manque d’humanité et des aspects non spirituels de ce monde.
Quand il travaille sur cette construction particulière, le thérapeute doit se poser la question : « Est-ce que les aspirations profondes de mon patient sont satisfaites (c’est-à-dire celles qui donnent un sens à sa vie, ce qui fonde sa quête existentielle) ? », dans la mesure où ces aspirations sont tellement reliées à son surdon, à ses passions, à ses objectifs et à ses motivations personnelles qui sont reliées à ou trouvent leur origine dans ses spécificités de surdoué.
Ainsi, un adolescent surdoué peut avoir une passion brûlante à vouloir apporter sa contribution sociale ou politique à une cause particulière. La personne qui va faciliter cette passion doit se poser la question de savoir comment elle va aider cet adolescent à satisfaire ses aspirations profondes. Cette construction suppose donc d’explorer très profondément ce qui fait l’être.
La satisfaction des aspirations profondes peut rester enfouie par un manque de validation, d’affirmation ou d’affiliation, ou par la combinaison des trois.
Un surdoué peut par exemple avoir conscience de ses aspirations profondes, mais pour autant, ne pas comprendre l’importance de ses ressentis.
Ces quatre constructions – Validation, Affirmation, Affiliation, Aspirations Profondes – représentent des blocs de construction importants pour le développement du Moi. Elle sont à l’interface avec et en même temps ont un impact sur les 12 systèmes plus loin développés, pour aider à façonner et à influencer la formation de l’identité du surdoué.
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This article first appeared in the Roeper Review, Vol. 20, No. 3, Pages 222-226.
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