Jed est canadien est étudiant en génie biomédical. Concerné par le surdon, il nous propose cette réflexion sur l’origine émotionnelle de la douance: la rage de maîtriser
Avertissement:
Le texte qui suit est un simple témoignage. Il n’a pas pour but d’enseigner quoi que ce soit, ni de convaincre qui que ce soit. C’est plutôt une piste de réflexion. À vous de consulter la bibliographie ou même d’aller plus loin pour vous faire votre propre opinion.
Introduction. L’origine de la douance est un sujet très controversé. La communauté scientifique se polarise trop souvent autour de la dichotomie générale nature/culture: naît-on surdoué ou le devient-on? Certains intervenants transcendent la controverse en mettant en exergue la synergie entre l’inné et l’acquis.
C’est le cas de la doctoresse Ellen Winner, qui a en plus le mérite de pointer un aspect particulier des surdoués pouvant faire le pont entre leurs dons de naissance et l’éducation reçue: la rage de maîtriser.
Dans ce texte, je vais commencer par présenter les points de vues des puristes (nature OU culture), pour me concentrer ensuite sur l’originalité des propos de Winner. Je finirai par une analyse personnelle qui peut être vue comme une piste de réflexion.
Nature. Pour certains chercheurs, il n’y a aucun doute: l’hyperefficience intellectuelle commence à la naissance. La preuve typique: les bambins qui apprennent à lire, dessiner ou calculer tous seuls, sans passer par le processus « normal » de transfert maître-élève.
Le caractère inné se remarque aussi en comparant les réalisations d’enfants surdoués à ceux d’enfants talentueux mis dans les mêmes conditions d’apprentissage. À terreau égal et dans leur(s) domaine(s) de compétence, les surdoués qui réussissent à mobiliser leur énergie dépassent de loin les talentueux. Selon le docteur Darold Treffert, il existerait même la possibilité de naître avec des « progiciels natifs » qui donneraient directement accès à certaines compétences.
Culture. Pour d’autres scientifiques, la douance est tout simplement le fruit du travail et des circonstances favorables. Premièrement, ils font remarquer que les prodiges (une forme extrême de surdoués) naissent souvent dans des familles où leur épanouissement est une priorité: ils reçoivent la stimulation, les moyens et l’éducation nécessaires. Que serait devenu Mozart sans son père?
Ensuite, à quelques exceptions près, une courbe d’apprentissage de 10 ans est nécessaire à tous ces prodiges pour atteindre vraiment le sommet de leur art. Enfin, certaines études démontrent par imagerie médicale que les cerveaux d’enfants en apprentissage intense présentent des changements morphologiques et fonctionnels; le cerveau du génie serait donc une adaptation anatomique et physiologique d’un cerveau « normal » soumis à des conditions extrêmes.
Synergie Nature/Culture. Ellen Winner adopte un juste milieu vraiment original. Elle prétend que la douance est un mélange de nature et de culture. Les enfants très bien encadrés et de bonne volonté ne deviennent pas forcément des prodiges. Et les enfants prodigieux ont souvent besoin de support dans leur chemin vers la perfection.
Les surdoués naissent avec un cerveau atypique. Il arrive par exemple que l’hémisphère droit compense les déficiences de l’hémisphère gauche, dont le développement a été retardé par un excès de testostérone durant la grossesse. Ainsi, il n’est pas rare que le langage soit géré par les deux hémisphères, ou qu’ils ne soient pas vraiment droitiers sans être franchement gauchers! Cette préhéminence de l’hémisphère droit pourrait expliquer certains talents créatifs (par exemple en art, en musique ou en mathématiques). Mais ces talents créatifs peuvent rester en friche si l’environnement immédiat de l’enfant ne s’intéresse pas à son épanouissement.
La rage de maîtriser. Selon Dr Winner, les surdoués, enfants ou adultes, présentent une rage de maîtriser certains domaines, notamment ceux qui sont régis par des règles (langue, mathématique, musique, les systèmes en général) – elle insiste sur le mot “rage” pour souligner l’intensité émotionnelle qui se cache derrière ce processus. L’obsession insatiable d’en apprendre toujours plus sur leur(s) centre(s) d’intérêt leur insuffle une énergie phénoménale.
Cette motivation serait naturelle et propre au surdoué, qui peut supporter (il le réclame d’ailleurs à grands cris) des heures de pratique ou d’apprentissage à concentration maximale. Par exemple, Marc Yu, enfant prodige, s’entraîne huit heures par jour au piano et affirme adorer chacune des minutes de sa journée. Il se réveille la nuit et force sa mère à le laisser pratiquer! Ce genre d’effort volontaire ne peut être demandé à un individu “normal”; non seulement il ne le veut pas, mais il ne le peut pas (toujours selon Dr Winner).
Combiné à sa facilité d’apprentissage, cette rage peut entrer dans un cercle vertueux compréhension–maîtrise aux dimensions insensées pour le commun des mortels. Ainsi, ce serait l’enfant, “naturellement enragé”, qui forcerait son environnement immédiat à lui fournir les moyens. Il s’engagerait de lui-même dans ces pratiques éducationnelles limites, qui en retour provoquent l’adaption anatomique et physiologique de son cerveau.
Analyse personnelle. Cette intensité émotionnelle du surdoué n’est pas une nouveauté; c’est une caractéristique de base prise en compte par tous les psychologues bien informés.
Mais vue comme origine de la douance, la rage de maîtriser est un concept radicalement nouveau dans ma compréhension de ce sujet. Et si la douance était finalement une coloration émotionnelle de la personnalité, et la surefficience cognitive… une conséquence nécessaire de l’organisme qui essaie de s’adapter à ces conditions extrêmes? Un surdoué serait donc un individu ayant naturellement un attachement obsessionnel compulsif à un système dont il comprend les règles.
Formulons autrement: tout ce qu’un surdoué semble vouloir dans la vie, c’est de maîtriser un/des système(s) dont il comprend les règles. À partir de cette définition, il paraît possible de récapituler une bonne partie de ce que vit cette population atypique. Comment ne pas se sentir seul quand pratiquement personne ne partage son obsession? Comment ne pas s’ennuyer quand on est entouré d’individus lambdas qui parlent de tout et de rien? Comment ne pas ressentir ce sentiment d’inacomplissement quand, croulant sous les pressions sociales, on passe à côté de l’obsession de sa vie?
Conclusion. Le surdoué semble être “possédé” par une nécessité intérieure qu’il n’a pas choisie. Sa vie est orientée vers un but (entéléchie) biologiquement déterminé, dont il ne peut dévier sans en subir les conséquences souvent néfastes. Sa rage naturelle de maîtriser un système dont les règles lui semble étrangement famillières le force à mobiliser son entourage pour rassembler les ressources nécessaires à sa quête.
C’est ainsi que sa nature contribue à sa propre culture. L’un des plus grands obstacles des surdoués consiste à faire le deuil d’une “norme” sociale dont il ne fera jamais partie.
À mon humble avis, ceux qui arrivent à faire ce détachement, et donc à réhabiliter la rage de maîtriser comme une composante essentielle de leur vie, ont résolu une bonne partie du problème de la douance.
Pour aller plus loin:
Documentaires Vidéos:
* En français : Voyage au centre du cerveau. Les surdoués de la créativité. (progiciel natif) – Partie 1 – Partie 2 – Partie 3
* En anglais (… sous-titré en espagnol…) : National Geographic. My brilliant brain. Born Genius. (Marc Yu)
le même en anglais non sous titré (attention, chargement très lent)
* Extraordinary People. The Musical Genius. (adaption du cerveau à l’apprentissage)
Documents:
* Ericsson Anders et al. The Role of Deliberate Practice in the Acquisition of Expert Performance. (environnement des surdoués prodigieux et courbe d’apprentissage de 10 ans)
* Winner Ellen. The Origins and Ends of Giftedness. (article)
* Winner Ellen. Uncommon Talents: Gifted Children, Prodigies and Savants. (article)
* Winner Ellen. Gifted Children: Myths And Realities. (livre)
En complémentà cette réflexion de Jed je vous propose également la lecture de deux billets :
– Q.I. or not Q.I. ? L’identification du surdon (11 / 12) – Du don au talent : l’expression du potentiel l’un des 12 billets rédigés par Stéphanie Aubertin
– Le modèle de Gagné
je dois bien dire qu’à 67 ans je découvre ici ce qui m’anime…et ce qui m’a animé , ça a commencé à mon adolescence ou j’ai décidé de passé seul en candidat libre un bac philo avec un an d’avance …après je me suis intéressé dans mon métier de médecin à des médecines parallèles ( acupuncture , hypnose…)…puis ça a été la musique (flute traversière baroque !!!) et je continue depuis 30 ans à pratiquer assidument , et je me suis à la retraite attelé aux langues et j’apprend avec délice et passion 5 langues depuis un an dont le mandarin le cantonais le gallois l’irlandais le tibétain…bref encore une fois des choses peu conventionnelles …au total on est hanté par une soif de connaissance mais aussi hors des sentiers battus
La curiosité n’est pas affaire d’âge, mais bien d’état d’esprit… 🙂
Bonjour,
Merci pour cette synthese et pour les lectures proposees. Je rejoins les autres commentaires car je me retrouve effectivement dans la partie concernant la « rage » et je prefere ne pas prendre en compte le caractere inne ( car cela ramenerait a des discussions de hierarchisation, ce que je redoute…). Il s’agit effectivement de rage de connaitre parce que tout simplement tout ce qui nous entoure a une certaine structure, une organisation logique. Il faut juste le temps pour la comprendre. Je m’explique: je dis souvent que le monde est comme un puzzle, il suffit juste de trouver les pieces. Certaines se laissent devoiler plus vite alors que d’autres se rajouttent plus tard (apprentissage, experience, etc). Et cela s’applique a tout ce qui nous entoure. Le probleme qu’une fois qu’on a compris le fonctionnement, c’est moins interessant. Et le deuxieme probleme est justement de pouvoir moderer cette rage de connaitre : comment savoir quand on en fait trop? Quels reperes prendre? Quelle est la moyenne de la population? Et surtout comment faire quand il y a autant de choses qui nous interessent? C’est extremement difficile de se contenter d’une version tres peu aboutie alors que nous avons la certitude de la structure parfaite ( cela peut paraitre pretentieux, effectivement). Comme j’avais l’habitude de le dire souvent, il y a toujours une solution. Le probleme est que le monde qui nous entoure ne cherche pas La Solution mais comment resoudre le plus rapidement et sans trop d’effort un probleme donne. Des lors, comment vivre dans un monde ou la pratique du minimum d’effort a ete erigee en principe fondamental?
Il est question (souvent) de perfectionnisme. Moi, je l’appelle plutot aspiration vers la beaute (des concepts, des idees). Et vers la sensation de liberte qu’elle procure.
Je me retrouve tout à fait dans ce que vous dites. Avec peut-être des mots différents. Vous parlez d’aspiration vers la beauté (des concepts, des idées). Et de la sensation de liberté que cela procure. Ne s’agit-il pas tout simplement de la quête de la Vérité sur ce monde, qui passe par le savoir et la connaissance ?
La formule d’Alexandre Zinoviev à la fin de son roman « les hauteurs béantes », me revient invariablement en mémoire lorsque j’aborde ce sujet :
« Je sais seulement une chose : le fondement de la véritable existence humaine, c’est la vérité. La vérité sur soi. La vérité sur les autres. L’impitoyable vérité. La lutte pour ou contre la vérité est la plus profonde et la plus acharnée des luttes. »
Et pourtant…de quelle vérité s’agit-il, puisqu’il existe autant de vérités et de mondes réels que d’êtres humains. Pour chaque individu, un monde unique, sa vérité. J’écris ces mots et pourtant je n’ai cherché et ne cherche encore que cela, la vérité, ou serait-ce de l’authenticité? Alors finalement, cette vérité je la cherche, tout en sachant que je suis multiple, jamais figée, différente à chaque personne que je rencontre. Pourtant, malgré ces mouvements de surface, les multiples personnes que j’ai été dans le miroir de chaque regard de chaque personne que j’ai croisée, qui n’était finalement que le miroir de l’autre, il existe bien quelque part, une unicité qui m’est propre et que personne ne peut atteindre, et c’est vrai pour chacun si on voulait bien croire qu’on a suffisamment de valeur pour la laisser exister.
Je suis pas sûre d’être claire, hum.
A l’échalote et à Ivan
Cet échange me renvoie vers cette quête de la vérité qui peut aboutir à la guerre.
C’est une remarque que fait Aldous Huxley au sujet du Père Joseph dans son roman l’Eminence Grise – le franciscain, conseiller de Richelieu, dévoué à Dieu et a priori pacifique, parce qu’il recherchait la vérité ( la vérité était catholique) n’en est pas moins à l’origine de la Guerre de 30 ans qui a déchiré l’Europe (on estime à 20 % la population européenne qui en est morte).
Certaines quêtes de vérité favorisent des absolus dangereux, l’équilibre est toujours fragile.
Hum, je pensais plutôt à la démarche scientifique et non à l’idéologie. La vérité procède du savoir et de la connaissance objective, non de la foi et d’un système de croyance qui sont le propre de l’idéologie. La religion est fondée sur la foi et non sur la connaissance. L’histoire de la chute et du « fruit défendu » me semble à ce sujet assez claire…
Cela dit il est des domaines comme la psychologie, où on ne trouve que des écoles, des théories concurrentes, et non des certitudes qui fassent consensus. La psychanalyse, par exemple, malgré son succès auprès des élites françaises comme système explicatif de la construction de la personnalité, n’a aucune base scientifique…
J’y ai pensé aussi, de l’importance des définitions. Je pense à la connaissance sans cesse remise en question plutôt qu’au dogme, à une vérité qui questionne celle qui est imposée. Est-ce une question de « karma », je ne peux rien faire dans cette vie qui ne soit authentique, je me le reprends immédiatement dans la figure. Je ne peux pas non plus mener mes « croisades » (car j’en ai, et une sacré pelletée), ça ne prend jamais. Je ne peux pas non plus dire ce que je vois, ça ne sert à rien, boomerang encore. Non, décidément, les hommes s’écharpent trop au nom de leurs convictions, de leur vérité, pour que j’aie envie d’y participer. J’ai observé ça toute petite, suffisait d’observer les réunions de famille où on parle de politique. C’est peut-être comme ça que les gens s’aiment après tout, je n’en sais rien, mais ça ne me semble pas approprié… « Mourir pour des idées, l’idée est excellente, moi j’ai failli mourir de ne l’avoir pas eue… ».
À Ivan : je ne pense pas que la connaissance objective existe, d’ailleurs la connaissance scientifique est éminemment changeante, non ?
@Tournevis : la connaissance objective est le but de la démarche scientifique. C’est ce qui nous a permis d’accéder à quelques vérités essentielles. Concernant la formation de la terre, l’évolution de l’humanité etc… Même une discipline comme l’économie, pourtant traversée par des idéologies de classe, des intérêts et des lobbies, recèle des mécanismes « objectifs » qui font consensus… Cela dit, la vérité, en économie, est un objet et un enjeu de pouvoir. La notion de lutte pour ou contre la vérité, prend dans cette discipline tout son sens… Cela ne signifie pas pour autant qu’il n’y ait pas de vérité objective qu’on ne puisse vérifier empiriquement (les politiques d’austérité, par exemples, sont contre productives, ne fonctionnent pas, mènent les pays à la faillite… Voilà une vérité économique enjeu de lutte.)
@echalote
il faut comprendre une chose basique, tout est competition pour tout dans la nature (mais avec des strategies eminamment complexes parfois, mutualistes, cooperatives aussi), meme les ideologies et meme les algorithmes mathematiques. sujet vaste et interessant. La lutte de tous contre tous est une vue simpliste et fausse. la complexité de la nature est etonnante (ex : collaboration entre un type de fourmi tropicale et un acacia specifique qui fournit gite et couvert a la fourmi )
Et il est meme probable que des robots vont nous supplanter plus tot que vous ne le pensez.
@tournevis
Concernant les theories scientifiques, il faut comprendre qu’on se rapproche de la realité mais eminamment complexe. La mecanique newtonienne a ete supplantée par la mecanique quantique etc
Ce qui est vrai c’est que les sciences exactes sont encore dans leur prime enfance et les psys peuvent etre considérés comme des charlatans (equivalent medecins du moyen-age). Tout ceci car toute science influencée par le pouvoir (la psychologie a une dimension politique evidente) ne peut atteindre la realité que de facon deformée.
Je me retrouve tellement dans ce que vous dites !
Pour moi le plus difficile, dans ce besoin de comprendre le sens réel des choses, c’est quand je me trouve confrontée à l’irrationnel. C’est surtout dans la relation aux autres que j’ai du mal. Si je n’arrive pas à comprendre le sens profond du comportement des autres, cela m’affecte énormément. Ça me travaille jusqu’à ce que j’aie compris. C’est presque comme une obsession. Tant que je n’ai pas trouvé la clé, je cherche, je tourne la chose dans ma tête sous tous les angles mais dans ma « naïveté », je ne pense pas aux arguments de mauvaise foi, que de nombreuses personnes utilisent. Du coup, tant qu’on ne m’a pas fait part de ce facteur, je peux rester coincée sur un truc et perdre une énergie folle, m’énerver, me retrouver en colère pour une broutille.
Ce besoin de tout comprendre peut vraiment être une richesse quand il offre des clés mais parfois je le vis aussi comme un aspirateur d’énergie. J’aimerais tellement juste parfois n’en avoir rien à faire, que les choses puissent glisser sur moi comme sur une toile cirée.
Cela a été aussi toute ma vie une obsession de comprendre les mécanismes de la communication, j’ai lu pour cela une quantité impressionnante d’ouvrages (La dimension cachée, Le langage silencieux -d’Edward T. Hall-, La nouvelle communication -de Bateson,Birdwhistell,Goffman,Hall,Jackson,Scheflen,Sigman,Watzlawick- Changement -de P.Watzlawick,J.Weakland,R.Fisch ect…) , j’ai acquis une finesse d’analyse extraordinaire dont je jubilais comme d’un pouvoir secret pour me protéger et améliorer la communication des autres si possible, mais cette connaissance n’est que pure illusion de pouvoir, il n’y a pas de volonté de changer des autres malgré leur médiocre communication et je ne suis pas investi par rôle supérieur reconnu bien au contraire , dans un monde où tout le monde triche l’homme vrai fait figure de charlatan, alors maintenant j’ai assez perdu de temps et d’énergie à comprendre et à vouloir changer le monde , le monde va son train dans le mur éventuellement, moi je regarde ailleurs là où il y a de la vie , je prend soin de moi prenez soin de vous aussi.
J’en suis arrivée à la même conclusion, je me suis suffisamment préoccupée du fonctionnement des autres, je m’intéresse à moi maintenant, car la clé de ma sérénité n’est pas ailleurs. Changer mon regard sur les choses que je ne peux pas changer, et changer ce qui peut l’être sans m’épuiser toutefois. Enfin j’essaye de m’occuper de moi, car c’est aussi une question d’habitude, et rien n’est plus difficile à changer que ça. En ce moment, outre le yoga que j’ai bien du mal à pratiquer quotidiennement malgré le bien qu’il me procure, je voudrais couper avec une hygiène de vie qui a été un mode de survie inconscient qui s’est installé, et dont je peine terriblement à me débarrasser. Cigarettes, alcool, sur lesquels je m’appuie pour m’anesthésier, canaliser mon énergie (comme je suis crevée tout le temps, je suis à peu près au même rythme que les autres), et j’ai peur de ce qui se passerait si je perdais ces pseudo béquilles qui me coupent les ailes pour me permettre de na pas trop remettre en question mon quotidien. Bon, je n’ai pas vraiment d’autre choix que de m’y atteler si je suis lucide. Connaissant la force du processus inconscient dans ces mécanismes, je me demande si je ne vais pas pratiquer l’hypnose, pour déverrouiller tout ça, parce que à un niveau conscient, le boulot est fait. Ma grande hésitation vient du fait qu’ayant déjà eu des expériences vraiment compliquées avec des psychologues, je crains de mal tomber encore une fois pour l’hypnose. Maintenant, comme je sais exactement ce que je veux, ça devrait me permettre de couper court rapidement si la direction n’est pas la bonne. Encore faut-il que je trouve un professionnel qui accepte de me suivre quand je lui dirai que je sais exactement ce que je veux, et qui n’essaie pas à tout prix de vouloir m’imposer ses vues. J’ai beaucoup digressé je m’en excuse!
C’est marrant, après être sorti de C.G.Jung, Janov, j’ai eu exactement les mêmes lectures : Watzlawick et l’école de Palo Alto. C’était en tout cas rafraichissant et intellectuellement stimulant (pas comme le gourou Freud…). Aujourd’hui je ne crois pas qu’il y ait une vérité à sortir de la psychologie, ou alors peut-être des cognitivistes et de la psychologie évolutionniste. Je vais m’attaquer au sujet 🙂
re.naître à soi même, désapprendre !!!
vider l’ancien pour laisser le neuf prendre sa place.
et notre Vérité apparaît alors dans Tout son Naturel .. nos dons aussi 😉
la Voie, Happyness !
J’aime bien cette idée de « rage de maîtriser », de chercher des règles (en posant qu’on peut aussi en chercher là où il n’y en n’a pas mais ce qui est intéressant c’est de faire le chemin de recherche 😉 ). Je m’y retrouve totalement (je n’ai de grande réussite en rien, mais pour moi c’est plutôt une attitude générale vis-à-vis de tout ce que propose la vie). Toutefois, je ne suis pas favorable aux hypothèses de déterminisme biologique, surtout quand elles ont cette « radicalité ».
blush 🙂
Cet article m’évoque quelque chose, je me demande si je suis hors sujet ou pas…je me lance. Je croyais ne pas avoir de passion réelle dans la vie (de multiples centres d’intérêt sans qu’aucun ne domine vraiment, et pourtant, j’aurais tout donné pour ça, ça m’aurait « guidée », j’aurais canalisé mon énergie). Jusqu’à ce qu’un jour, mon mari ne range des livres et s’exclame, réellement sidéré : « est-ce que tu te rends compte du nombre de bouquins de psycho que tu as? Et tu dis que tu n’as pas de passion? ».
En fait, j’ai fait des recherches toute ma vie, pratiquement à mon insu, dans un but personnel : savoir qui je suis, comprendre le monde dans lequel je vis, et apprendre à vivre avec les autres. Comprendre pourquoi l’école, le milieu du travail étaient une telle souffrance, pourquoi je me sentais seule, pourquoi je me sentais inadaptée, rejetée souvent, comment mieux communiquer, puis comment m’accepter. Une expérience entraînait une lecture puis une autre, j’ai commencé par la PNL quand j’étais jeune, puis la communication non violente, la gestion des conflits, la notion de bouc émissaire, pour arriver à Alice Miller (quand j’ai vécu quelque chose de vraiment difficile pour moi en tant que rencontre), des lectures sur la douance (dans le même temps d’ailleurs) et à des lectures plus spirituelles, la relaxation, l’hypnose, etc.
La première fois que j’ai compris qu’on n’est blessé que parce qu’on a une blessure ou une faille pré-existante (vers 25/30 ans), un monde s’est ouvert à moi. Personne n’est blessé de la même chose, si je le suis, c’est que la souffrance existe déjà en moi. L’autre n’est qu’un révélateur, la réponse est en soi.
J’ai commencé par rechercher comment améliorer mes relations avec les autres, puis je suis allée beaucoup plus loin en finissant par lever le voile qui pesait sur ma famille. Excessivement douloureux et violent, mais j’étais libre, j’avais posé les mots sans jugement : une famille toxique, de génération, en génération, on arrête la transmission. Les mots n’ont pas libéré que moi, mais tout le monde autour.
Ce but, je le poursuivais en réalité avec acharnement et constance depuis mon enfance, malgré les moqueries sur mes questions, les évitements, les agacements, les « tu me fatigues », pour ne pas dire « tu nous emmxxxde », toutes le tentatives pour que je ne remette surtout rien en question. Je n’ai rien lâché tant que je n’ai pas compris de quoi il en retournait, et posé les mots justes sur cette famille et sur moi, ça m’a pris 38 ans . J’ai encore envoyé mon père à la pêche aux informations familiales il y a peu, et à ma grande surprise, il a accepté cette fois. Maintenant, les blessures existent toujours, mais je n’ai plus l’impression d’avancer les yeux bandés dans un monde plein de pièges, j’ai très peu d’amis, mais ça n’est plus une malédiction. Une phrase que j’aime beaucoup dans une chanson de Goldman (que j’aime beaucoup!) : » Garde cette chance, que nous t’envions en silence, cette force de penser que le plus beau reste à venir ». J’ai cette chance là, je l’ai toujours eue, malgré les très (très) bas, j’ai toujours cette conviction là. Refus du temps cyclique, refus de ne pas progresser, je veux comprendre, apprendre. L’erreur est humaine, elle est indispensable pour avancer, j’en ai fait plein, j’en ferai d’autres, comment savoir qui on est autrement qu’en expérimentant? Je commence à aimer mes erreurs. On ne peut pas changer en restant soi-même, ça n’est pas toujours confortable, mais c’est passionnant. Alors, je crois que je me suis retrouvée dans cette « rage de maîtriser », ou tout au moins de comprendre, mon environnement, et moi-même. Ne pas vivre en aveugle, poser les fardeaux transmis par les autres (mais pour les poser, encore faut-il savoir ce qu’il y a dedans), pour être (le plus) libre (possible).
Merci pour ce témoignage fort léchalote.
A mon sens, il permet de rapporter au quotidien « lambda » ce qui est ici présenté avec des gens particulièrement exceptionnels, et c’est d’ailleurs pour cela qu’ils sont présentés.
Dans cet article et les exemples présentés se pose aussi en filigrane, la question du perfectionnisme qui peut être envahissant, pathologique.
Oh, comme ça me parle ! L’article, et le témoignage de Léchalote qui l’illustre très bien. Merci aux deux.
Ton cas est vraiment très intéressant parce que je le vis aussi, à ma façon. Quand une question m’intéresse je m’engouffre dedans comme un forcené. Et je ne m’arrête pas, jusqu’à ce que je ressente une émotion qui se rapproche étrangement de la satiété. C’est comme si j’avais très soif et qu’il fallait trouver rapidement un point d’eau.
Ce n’est donc pas vraiment une passion que je poursuis, mais un besoin que je cherche à assouvir. Je définis ce besoin comme étant la curiosité. La curiosité c’est la nécessité que je ressens d’en apprendre plus sur un sujet qui m’intéresse. Le plus souvent, ce sujet a un rapport avec ma propre vie, ma propre personne; il me procure du plaisir ou apaise mes angoisses.
Je peux me tromper, mais j’ai vraiment l’impression que c’est un besoin de ce genre que tu cherches à assouvir. Tu cherches la vérité avec une énergie insensée, avec rage justement, car pour toi c’est une question de vie ou de mort. Tu te débats comme pour sortir la tête hors de l’eau et aspirer enfin une salvatrice bouffée d’oxygène.
Il faut faire attention au terme « passion ». Si tu regardes de très près les gens « passionnés », tu verras qu’ils répondent tous à un besoin. La différence entre une passion et un besoin c’est qu’on ne peut pas vivre sans le dernier. On est obligé d’assouvir nos besoins. Essaie de priver un coureur de sa piste, un scientifique de ses recherches, un musicien de ses instruments; ils dépériront tout simplement.
À mon humble avis, la rage de maîtriser relève plutôt du besoin. Cette rage grille le surdoué et peut littéralement le tuer. Le système qu’il veut maîtriser et dont il comprend les règles, est pour lui un îlot d’ordre et de contrôle dans un univers qu’il perçoit comme chaotique. Imagine qu’on te catapulte au beau milieu de Pékin; tu te sentirais si seule, si isolée. Que ne serais-tu pas près à donner pour trouver un dictionnaire français-chinois, une carte ou même un roman en Français?! Tu t’y accrocherais parce que c’est tout ce que tu as. Je pense que c’est la même chose pour le surdoué.
Et si ce besoin de vérité était finalement la passion que tu cherchais? Pour moi c’est le cas. Quand je regarde en arrière je me rends compte que ma quête de vérité à été la source de mes plus grandes peines, certes, mais aussi de me PLUS GRANDES JOIES. Des joies qui ne sont pas de l’ordre du descriptible. C’est en cherchant la vérité que je perds la notion du temps, caractéristique presque infaillible de la passion.
Le problème: quel nom donné à ce besoin pour qu’il sonne comme une passion? Parce que c’est un peu cela le drame. Je suis quelque part: une personne A dit « j’aime la musique », une personne B « j’aime la dance ». Et moi je dis « j’aime la vérité »; je sonne immediatement comme un extra-terrestre. Pire, quand je leur dirai que je cherche la vérité à travers tout, même dans la musique et dans la dance, ils me prendront pour un extra-terrestre profondément aliéné qui a besoin d’aide! Je m’intéresse à tout à travers ma quête et je n’accepte les frontières arbitraires que les gens placent entre les domaines.
Pour l’instant, j’appelle cette « passion » la philosophie, mais dans le sens premier du terme. La philosophie en tant qu’amour de la sagesse, attachement à une juste connaissance des choses qui donne cet art de vivre qui apaise. J’ai donc la rage de maîtriser un système philosophique que je crée moi-même au fur et mesure. Voilà.
J’espère que cela t’aidera.